lundi 15 octobre 2007

L'essentiel

Les Journées de la culture sont à l’automne ce que les volées d’outardes sont à nos printemps : un signe d’espoir. Chaque septembre québécois se termine par trois jours d’activités artistiques gratuites offertes à tout public. Quel est le sens d’un tel évènement ?
La question demeure très actuelle.


Arts Édito
La Culture, vitale pour tous


Plus de soixante organismes culturels, institutions et travailleurs en art du Saguenay-lac-Saint-Jean ont participé à ces journées de «démocratisation» de la culture offrant à tous la possibilité de découvrir les processus de la création, de la production et de la diffusion culturelle. La notion de gratuité est essentielle à la pertinence d’une telle activité qui vise à promouvoir l’accès pour tous à l’expression artistique de notre société.

L’accès. Voilà bien le mot à mettre en évidence parce qu’il est est porteur d’une vérité trop souvent occultée: l’accès aux activités culturelles est indispensable à une société comme l’eau peut l’être à la vie même de notre monde.

Les activités culturelles ont un impact économique réel qui ne devrait pas être remis en question. Pourtant, il est utopique de croire que les artistes et organismes culturels ne seront pas sans cesse contraints de justifier leur raison d’être et d’agir tant que nous ne cesseront pas de les percevoir comme produits et services. Nous avons érigé une société de consommation où le profit matériel cautionne la valeur bien plus que l’esprit. Le pouvoir appartient à ceux qui contrôlent tout ce qui régit notre société, incluant l’air que nous respirons, l’eau que nous buvons, la terre que nous cultivons, jusqu’aux idées nourrissant notre pensée collective via tous les moyens de communications existants.

Par action ou par inaction, par la parole ou le silence nous sommes ce que nous avons choisi. Les Journées de la culture nous incitent à mieux saisir la perspective de notre réalité spirituelle. Laquelle est aussi essentielle à notre développement que l’eau à la vie même.

L’histoire humaine s’inscrit dans nos gènes à travers tout ce qui a été vécu par nos ancêtres. Héritage dont la connaissance est transmise à travers l’expression des cultures successives. L’art des sons, l’art des formes et des couleurs, le langage magnifié par les poètes, le théâtre et la littérature, témoignent de tous nos âges. Passé, présent et futur se révèlent, s’affirment et se développent à travers la pensée exprimée. Imaginons l’effacement total de toutes les traces de notre culture. Le mot réduit à l’unique fonction pratique. Avance, marche, mange, dort, travaille. Pas de musique. Pas d’autres images que la limite de ce que nos yeux voient. Le désert où s’ébat un troupeau éphémère.

L’acculturation d’une société entraîne son isolement, la prive de ses racines et des liens nécessaires à toute évolution. L’enjeu est si grand que les organisateurs des Journées de la culture insistent sur son importance: «Plus que jamais, dans le contexte mondial où la protection de la diversité culturelle devient un enjeu majeur pour le développement des pays, la promotion du droit à la culture pour tous les citoyens apparaît comme une des mesures les plus pertinentes pour conserver, renforcer et stimuler la vie culturelle.»

Si nous ciblons plus spécifiquement le Saguenay-Lac-Saint-Jean dans le contexte culturel québécois nous comprenons encore mieux l’impact culturel sur le devenir social. L’isolement géographique qui aurait pu être réducteur a, au contraire, explosé en ramifications étonnamment riches sous la pression créatrice de nos auteurs, peintres, musiciens, comédiens, danseurs et interprètes. Le rayonnement et la vivacité culturel du Saguenay et du Lac Saint-Jean a franchi toutes les frontières par la qualité et le nombre, par l’originalité et la diversité de nos artistes. Une éclosion qui doit tout à l’appropriation et au développement de notre culture par les nombreuses personnes qui ont consacré leur vie à la formation artistique de nos enfants. Ce choix de société est le facteur déterminant de notre authenticité culturelle.

Cela est d’une évidence telle qu’il serait dangereux d’oublier qu’elle entraîne une responsabilité commune afin d’en assurer la continuité. Et cela signifie prendre conscience que l’on ne s’interroge pas plus sur l’accessibilité de l’eau pour tout citoyen, l’importance des routes pour chaque communautés que sur la pertinence de subvenir au développement culturel de la région. Il ne s’agit pas d’un investissement dont la pertinence se démontre par un profit matériel. Il s’agit d’une source vitale pour tous.


Ce texte a été publié dans le
Progrès-Dimanche le 3 octobre 2004

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